La prestation compensatoire
Cet article ne concerne pas uniquement les grandes fortunes ! Nul besoin d’être richissime pour être concerné par la prestation compensatoire. Il suffit simplement qu’il existe entre les époux (uniquement les époux, pas les concubins, pas les partenaires pacsés), un déséquilibre de revenus ou de patrimoine.
I- Qu’est-ce que la prestation compensatoire ?
Ce déséquilibre, on le constate régulièrement, est souvent au détriment des femmes, pour deux raisons :
D’une part, les femmes, malheureusement, gagnent encore souvent moins bien leurs vies que leurs maris, et d’autre part, les habitudes ayant la vie dure, elles ont tendance, plus souvent, à mettre de côté leurs vies professionnelles pour s’occuper des enfants.
Il en résulte, naturellement, et c’est regrettable, que leurs situations financières, sont, en général, moins bonnes que celles de leurs époux.
Quoi que l’on pense du principe de la prestation compensatoire, c’est précisément pour ces raisons qu’elle existe : Compenser la perte financière, la perte de niveau des femmes qui, ne travaillant pas, s’étant occupé des enfants pendant de nombreuses années, étaient totalement dépourvues en cas de divorce. Financièrement dépendantes, elles n’avaient donc pas la liberté de divorcer.
En pratique, aujourd’hui, c’est souvent le point le plus conflictuel des divorces.
L’article 270 du Code civil en donne la définition :
« L’un des époux peut être tenu à verser à l’autre une prestation destinée à compenser, autant qu’il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vies respectives. »
Tout est dit.
Il s’agit donc de permettre au moins fortuné des deux, de vivre dans des conditions les plus proches possibles de celles de son ex.
Prenons un exemple :
Un couple, marié depuis 20 ans, et ayant des enfants a toujours vécu dans un grand appartement dans le 6ème arrondissement, essentiellement payé, ou appartenant, à Madame. Monsieur, lui, n’a pas vraiment d’économies et un salaire deux fois inférieur à celui de son épouse.
Lors du divorce, Madame devra lui payer une prestation compensatoire, lui permettant de maintenir un train de vie confortable, de se loger à proximité de chez elle, de pouvoir recevoir les enfants correctement. Son niveau de vie baissera évidemment, mais, et c’est toute l’idée, il diminuera un peu moins, par l’effet de la prestation.
Madame, pour sa part, devra peut-être vendre l’appartement ou le rendre, pour en prendre un plus petit, rapprochant ainsi son train de vie, de celui de son ex.
Cet exemple est évidemment un peu caricatural, et il n’est évidemment pas question d’égaliser ni les niveaux de vie, ni les niveaux de patrimoines, mais « de compenser, autant qu’il est possible, la disparité » : L’idée générale est d’éviter qu’après avoir vécu 15 ans, en bordure du jardin du Luxembourg, l’époux le moins fortuné soit contraint de s’installer dans un deux pièces à Argenteuil.
Juste, injuste, chacun se fera son idée, toujours est-il que la loi est ainsi faite.
Ceci étant précisé, rentrons dans le détail du calcul de la prestation.
II – Comment la prestation compensatoire est-elle calculée ?
La loi, et précisément l’article 271 du Code civil, fixe les critères à prendre en compte pour la détermination de son montant. Sans être exhaustif, citons en quelques-uns :
- La durée du mariage: Plus le mariage aura été long, plus le montant accordé sera élevé. A contrario, pas la peine d’espérer toucher une pension alimentaire après avoir épousé une milliardaire, et divorcé au bout d’un an. Attention, c’est de la durée du mariage dont il s’agit, le concubinage antérieur n’est pas pris en compte.
- L’âge et l’état de santé: Il est évidemment plus facile de retrouver un travail, de refaire sa vie jeune, qu’à 70 ans, en bonne santé que malade.
- Les qualifications professionnelles des époux: Elles influent naturellement sur la capacité à retrouver un emploi.
- Les conséquences des choix professionnels faits par l’un des époux pendant la vie commune pour l’éducation des enfants et du temps qu’il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne.
Il n’existe pas de grille, pas de références, pas de méthode imparable pour la calculer.
Plusieurs professionnels du droit ont proposé des méthodes, pondérant chacune différemment les différents critères fixés par la loi. Cela permet de déterminer une fourchette, mais faute d’accord, le montant est fixé par le juge.
En principe la prestation doit être versée sous forme de capital, mais le juge peut prévoir que ce capital sera payé de façon échelonnée sur 8 ans.
La fixation de la prestation compensatoire est loin d’être un sujet anecdotique : Elle concerne un grand nombre de divorces contentieux, et son montant est indifférent de la cause du divorce, ce qui signifie que même l’époux fautif peut en bénéficier.
Pour obtenir gain de cause, il est nécessaire de disposer d’arguments solides, étayés par des pièces et de formuler des proportions cohérentes, sous peine de subir de plein fouet l’aléa judiciaire.